La Sorbonne et sa reconstruction

 

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Marina, bibliothécaire au musée d'Aquitaine, a lu La Sorbonne et sa reconstruction de Philippe Rivé (Ed. La Manufacture, 1987) et vous en parle...

"Fin XIXe, Bordeaux se dit qu'elle ferait bien d'avoir de belles facultés parce qu'en province aussi on en a dans la tête. Sauf que voila, une université en plein centre-ville, ça ne se construit pas comme ça ! Tiraillements sur les budgets et les choix déco pour accueillir les futurs étudiants. Un siècle après, un peu à l'étroit, tout ce beau monde s'en va pour faire les fous sur le campus. Le musée d'Aquitaine en profite "c'est assez classe ici, un peu de home-staging et on s'installe..." Pas mal, non ?" 
 
 
À venir feuilleter à la bibliothèque du musée en sortant de l'exposition "L'Art pour le savoir. L'Université dévoile ses collections", du 6 février au 6 mars 2016 !
 
 

 

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Critique de Françoise Mayeur


Paru pour l'exposition qui célébrait le centenaire de la reconstruction de la Sorbonne, ce volume très élégamment présenté contient d'abondantes illustrations : reproductions de tableaux et de détails de décoration, photographies de cartons et de plans, d'aspects de l'état ancien comme de la reconstruction. La part des contributions relative aux circonstances historiques et aux intentions qui accompagnèrent cette reconstruction est des plus modestes : en dix pages, André Tuilier définit l'« enjeu politique et idéologique de la nouvelle Sorbonne » : « acte de foi positiviste » des républicains qui veulent relever le défi des universités étrangères, mais aussi synthèse des historiens républicains qui présentent la constitution de l'unité nationale sous la monarchie, les grands moments de la philosophie française, comme autant d'étapes nécessaires à la naissance de la France nouvelle. L'iconographie et la symbolique de la Sorbonne républicaine traduisent bien cette pensée systématique. Comme l'observe Maurice Agulhon, « un désir proprement idéologique de proclamation » n'est pas à sous-estimer, mais la « rupture novatrice » veut côtoyer la « continuité séculaire ». Peu d'allégories républicaines donc, telles que coqs gaulois et bonnets phrygiens, mais la galerie des grands hommes : de Robert de Sorbon à Pasteur et Victor Hugo dans la cour d'honneur, en passant par Descartes, Richelieu, Pascal et Turgot. La Sorbonne, observe Bruno Foucart dans un exposé liminaire, « n'est pas encore devenue un de ces édifices qui accrochent la sensibilité contemporaine » : l'histoire de l'architecture s'est beaucoup moins penchée sur les «palais universitaires» que sur les simples écoles, et l'architecte Nénot, jeune alors, expie peut-être d'avoir trop vécu et d'être devenu le symbole de la résistance à l'« art nouveau ». Nul doute que les exposés réunis dans ce volume ne contribuent puissamment à réhabiliter l'homme et l'uvre. Mais la Sorbonne est autre chose et plus qu'un moment d'histoire de l'art. Il est à regretter que l'occasion n'ait pas été saisie d'évoquer plus en profondeur les circonstances intellectuelles et politiques de sa reconstruction.

 

Référence bibliographique

Mayeur Françoise. Philippe Rivé (Dir.), La Sorbonne et sa reconstruction, Lyon, La Manufacture, 1987. In: Histoire de l'éducation, n° 37, 1988. pp. 126-127.

www.persee.fr/doc/hedu_0221-6280_1988_num_37_1_1580

 

La Sorbonne et sa reconstruction, Philippe Rivé

La Sorbonne et sa reconstruction, Philippe Rivé