L'art de la photographie, des origines à nos jours

Citadelles & Mazenod, collection L'art et les grandes civilisations, 2007, 620 pages
Sous la direction de André Gunthert et Michel Poivert

Cet ouvrage d'exception appartient au Fonds Goupil, dont la bibliothèque a été rattachée à celle du musée d'Aquitaine.

Ce magnifique livre propose en dix chapitres rédigés par les meilleurs spécialistes de l'histoire de la photographie un ensemble de récits ouvrant sur toutes les époques.

Prenant pour axe central la question de l'art et de la culture, ces récits traversent de longues périodes en synthétisant les grands enjeux de la modernité. Attentifs aux débats d'époques - la photographie entre art et science, amusement ou profession, espace social ou laboratoire technique -, les auteurs nous font découvrir le daguerréotype et le calotype du XIXe siècle, les méthodes d'observation, l'univers des amateurs comme celui des artistes en s'appuyant sur le formidable renouvellement des questions esthétiques de l'époque contemporaine. Cherchant à montrer comment, tout au long du XIXe siècle, la photographie a fait l'objet d'une construction de son univers dans une quête de légitimité, l'ouvrage nous emmène ensuite dans une traversée du XXe siècle où la photographie participe à toutes les révolutions artistiques comme à toutes les évolutions de la communication. Tour à tour mobilisée par les avant-gardes et les nouveaux médias illustrés, la photographie est tout aussi bien œuvre d'art que document, matrice expérimentale et message politique.

Platt D Babbitt, Chutes du Niagara, vers 1850, daguerréotype colorié, 
National Museum of american History, Smithsonian Institution

Par des histoires, plutôt qu'une histoire de la photographie, cet ouvrage révèle le dynamisme de la recherche qui conduit depuis plus de dix ans à un renouvellement des approches où se mêlent désormais histoire de l'art et histoire culturelle.

L'originalité de ce volume est triple. Plutôt que de prétendre à une histoire exhaustive de toutes les manifestations de la pratique photographique, il recadre la préoccupation historique autour du dialogue entretenu depuis ses origines par l'enregistrement mécanique avec les domaines de l'art et de la culture. Ce faisant, il présente la première histoire critique de la tradition photographique, dont il révèle les articulations et les contradictions. Mais sa principale caractéristique est la proposition d'un nouveau récit, construit, charpenté, lisible. Une histoire à lire, une histoire qui explique et éclaire une trame dense de près de deux siècles, d'une rare complexité : voici ce qu'offre un ensemble cohérent de textes, voués à dégager l'économie des mécanismes généraux, dont plusieurs sont décrits pour la première fois. La synthèse que nous proposons est, comme de coutume, un état provisoire d'un savoir en marche. Elle se veut conforme à la mission de l'histoire, qui est d'apporter du sens, non d'augmenter la confusion.

Images inédites ou icônes fameuses, documents étonnants ou œuvres d’art célèbres, l'ouvrage présente en dix chapitres et près de 600 illustrations un parcours à la fois savant et séduisant. Un nouveau récit des origines dévoile le rôle du monde de l'art dans la première réception du médium, mais aussi la vitalité apportée par le commerce ou l'importance du dialogue franco-américain. Plutôt qu'une histoire articulée par le tête-à-tête du photographe et sa machine, le volume souligne en permanence l'apport essentiel des institutions: sociétés, publications, expositions ou musées. Pour les amateurs victoriens comme pour les directeurs de journaux, pour les scientifiques comme pour les artistes, l'image construite s'avère un ressort majeur du dynamisme du médium, non moins puissant que sa fonction classique de traduction fidèle du visible. Parmi les apports inédits de l'ouvrage, signalons encore une nouvelle synthèse du rôle de la photographie dans les sciences, la première histoire graphique de la presse illustrée, ou une analyse contextualisée du rôle du MoMA. Au total, l'image qui se dégage est bien une image nouvelle: non plus celle d'une photographie servante des arts et des sciences, mais celle d'un médium acteur de l'art, de la culture et du savoir, opérateur de quelques-unes des évolutions décisives du monde moderne.

Erwin Blumenfeld, Line on face, vers 1947-1949, 
Paris, musée nationale d'art moderne, Centre Pompidou

1. La génération du daguerréotype
- La rencontre de la machine et de l’homme (1839-1851), par Paul-Louis Roubert.
- Le daguerréotype aux Etats-Unis : un art social (1839-1861), par François Brunet.

2. L’institution d’une culture photographique
- Une aristocratie de la photographie (1847-1861), par André Gunthert.

3. Aux limites du savoir
- La photographie et les sciences de l’observation (1845-1900), par Marta Braun.

4. La volonté d’art
- De la photographie victorienne au mouvement pictorialiste (1857-1917), par Michel Poivert.

5. Le jeu des amateurs
- L’expert et l'usager (1880-1910), par Clément Chéroux.

6. Les formes de l’information
- De la presse illustrée aux médias modernes (1843-2004), par Thierry Gervais et Gaëlle Morel.

8. L’esthétique du document
- Le réel sous toutes ses formes (1890-2000), par Olivier Lugon.

7. La création expérimentale
- La recherche de nouveaux langages visuels (1917-1980), par Nathalie Boulouch.

9. La nostalgie du moderne
- Le MoMA : institution de la photographie moderniste (1937-2000), par Kevin Moore.

10. Un art automatique ?
- La photographie au cœur des stratégies de l’avant-garde (1915-1975), par Michel Poivert.

 

Biographie:
André Gunthert : Historien de l'art, chercheur, éditeur, il est maître de conférences à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales où il a créé le Laboratoire d'histoire visuelle contemporaine. Vice-président de la Société française de photographie, il a fondé et dirige la revue Etudes photographiques. André Gunthert a notamment publié ou codirigé : L'instant rêvé, Albert Londe (J. Chambon, 1993), La Révolution de la photographie instantanée (BNF, 1996), Voir/Ne pas voir la guerre (Somogy, 2001).

Michel POIVERT: professeur en histoire de l'art contemporain/histoire de la photographie à l'université Paris 1. Président de la Société française de photographie, il dirige en 2004 l'exposition " L'Utopie photographique " à la Maison européenne de la photographie. Spécialiste du mouvement pictorialiste, auquel il a consacré sa thèse, il déploie également une activité nourrie de commissariat dans le domaine de la photographie contemporaine. Il a notamment publié : La Photographie pictorialiste en France (BNF/Hoëbeke, 1992), La Photographié contemporaine, (Flammarion, 2002), L'image au service de la révolution, Photographie, surréalisme, politique, (Le Point du Jour, 2006).

Arthur Fellig Weegee, Charles Sodokoff and Arthur Webber use their top hats to hide their faces, 1942, MoMA, New York

L'art de la photographie - Citadelles & Mazenod

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